Redevances : Le Québec toujours au bas de l’échelle

COMMUNIQUÉ – Pour diffusion immédiate

Réplique à Nathalie Normandeau sur les redevances minières

Québec, mercredi 18 mai 2011— Le Québec est toujours au bas de l’échelle pour ce qui est des redevances perçues sur les mines, voilà ce que la coalition Québec meilleure mine! et MiningWatch Canada révèlent, aujourd’hui, dans une analyse comparative des différentes provinces et territoires canadiens (voir annexe). « Malgré les changements apportés au régime de redevances en 2010, le Québec demeure loin derrière avec des redevances qui équivalent à peine à 2 % de la valeur brute produite. Toute proportion gardée, c’est 2 à 3 fois moins que les meilleurs rendements au pays. Le Québec accuse un tel retard depuis les 8 dernières années, que son manque à gagner se chiffre maintenant entre 1 et 4 milliards de dollars par rapport aux meilleurs taux de redevances ailleurs au pays. Ce piètre rendement est inacceptable, particulièrement à l’aube d’un Plan Nord fortement axé sur les mines et dans le contexte d’un boom minier sans précédent au Québec » affirme Ugo Lapointe de la coalition Québec meilleure mine!

Le gouvernement contredit

Les résultats de cette analyse viennent contredire les propos tenus récemment par différents représentants du gouvernement, notamment ceux de la ministre Nathalie Normandeau affirmant que le Québec bénéficie maintenant du régime de redevances « le plus contraignant au pays »[1]. « Cette affirmation est tout simplement fausse, même lorsque l’on considère la récente hausse de redevances sur les profits appliquée en 2010 » dénonce Ramsey Hart de MiningWatch Canada.

Le Québec au bas du palmarès

Selon Christian Simard de Nature Québec  « C’est consternant de constater que le Québec se contente toujours de si peu en retour de l’exploitation de ses ressources non renouvelables ». Pour l’année fiscale 2009/10, Québec n’a perçu qu’un maigre 114 M$ en redevances sur des revenus de plus 5,6 milliards. En comparaison, la Colombie-Britannique a perçu 2 fois ½ ce montant pour un même niveau de production. Toute proportion gardée, Terre-Neuve et les Territoires-du-Nord-Ouest ont quant à eux généré 3 fois plus de redevances que le Québec au cours de la même année. « Il est urgent de revoir le régime de redevances et d’avoir un franc débat sur le modèle de fiscalité minière à instaurer au Québec » insiste Henri Jacob de l’Action boréale Abitibi-Témiscamingue.

Au cours des 8 dernières années, l’écart est tel que le Québec a perçu en moyenne 5 fois moins de redevances que l’ensemble des principales juridictions minières au pays, excepté pour l’Ontario, qui figure également au bas du palmarès. Les 8 provinces et territoires considérés dans cette analyse représentent plus de 90 % de la production minière au pays. Les données compilées proviennent de Ressources naturelles Canada et du ENTRANS Policy Research Group, qui publie chaque année des données fiscales pour le compte de l’industrie (voir annexe).

Urgent de revoir le modèle de redevances

Québec meilleure mine! insiste depuis plus de deux ans sur la nécessité d’un régime de redevances « plancher », avec un taux sur la « valeur brute produite » plutôt que sur les « profits ». « Les profits sont hautement malléables et peuvent être facilement réduits, voire ramenés à zéro grâce à toutes sortes de déductions possibles. C’est ce qu’avait dénoncé le Vérificateur général en 2009 et les récents changements du gouvernement ne change rien à cette réalité : les redevances s’appliquent toujours et uniquement sur les profits » explique Christian Simard.

 Des redevances planchers s’appliquent pourtant déjà ailleurs au Canada, notamment en Colombie-Britannique, au Nouveau-Brunswick et à Terre-Neuve. Elles s’appliquent également ailleurs dans le monde, comme en Australie, en Chine, en Inde et aux États-Unis (Michigan, Arizona). Des redevances planchers permettraient d’assurer que toutes les ressources exploitées du sous-sol québécois seraient compensées. « C’est comme une forme d’assurance, un seuil minimal de compensation pour l’épuisement de nos richesses collectives et non renouvelables » explique Ugo Lapointe.

L’exemple Australien

Dans la plupart des états australiens –tous de très grands producteurs miniers– on applique déjà des redevances « planchers » qui varient généralement de 3 à 8 % de la valeur brute produite. Ces redevances sont parfois mêmes combinées à un deuxième taux de redevances sur les profits (jusqu’à 30 % dans les cas du fer et du charbon). « Si de telles redevances étaient appliquées au Québec, nous garantirions à l’État un retour de 2 à 3 fois supérieurs aux prévisions actuelles du gouvernement pour prochaines années » estime Ugo Lapointe.

 L’exemple de l’industrie

Des redevances planchers sur la valeur brute produite s’appliquent même au sein de l’industrie lorsqu’une compagnie vend un actif minier à une autre compagnie. C’est le cas, par exemple, de la compagnie Virginia qui a vendu, en 2004, le gisement d’or Éléonore (Baie-James) à la compagnie Goldcorp pour plus de 450 millions $. En plus, elle se garde une redevance plancher pouvant atteindre 3,5 % de la valeur brute qui sera produite par la mine au cours des années à venir. Québec meilleure mine! évalue la valeur de cette redevance à près de 300 millions si les ressources sont exploitées au prix 1000 $/once d’or.

Ouvrir le débat

Au-delà de la question des redevances, Québec meilleure mine! est d’accord pour ouvrir le débat à l’ensemble de la fiscalité minière et des nouveaux modèles qui pourraient être envisagés. « Redevances, congés fiscaux et subventions, prises de participation dans les entreprises, 2e/3e transformations, voilà autant de questions d’intérêt public qui méritent d’être débattues, particulièrement à l’aube d’un Plan Nord fortement axé sur les mines et dans la foulée du dépôt du nouveau projet de loi sur les mines » affirme Henri Jacob.

« Ce débat est nécessaire, non seulement pour s’assurer que l’État tire davantage de bénéfices de l’exploitation de nos ressources non renouvelables, mais également pour mieux contrôler le rythme d’exploitation et, dans certains cas, éviter les effets néfastes de « booms miniers » trop rapides. Au final, l’État doit remplir son rôle de fiduciaire de la ressource et s’assurer d’une meilleure redistribution de la richesse pour les générations actuelles et futures » de conclure Christian Simard.

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Pour information :

  • Ugo Lapointe, coalition Pour que le Québec ait meilleure mine ! 514-708-0134
  • Ramsey Hart, MiningWatch Canada, 613-614-9937
  • Christian Simard, Nature Québec, 418-928-1150
  • Henri Jacob, Action boréale de l’Abitibi-Témiscamingue, 819-738-5261

La coalition Pour que le Québec ait meilleure mine ! (www.quebecmeilleuremine.org) a vu le jour au printemps 2008 et est aujourd’hui constituée d’une vingtaine d’organismes représentant plusieurs dizaines de milliers de membres au Québec. La coalition s’est donnée pour mission de revoir la façon dont on encadre et développe le secteur minier au Québec, dans le but de promouvoir de meilleures pratiques aux plans social et environnemental.

Les membres actuels de la coalition : Action boréale Abitibi-Témiscamingue (ABAT) ▪ Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique (AQLPA) ▪ Association de protection de l’environnement des Hautes-Laurentides (APEHL) ▪ Centrale des syndicats du Québec (CSQ) ▪ Chaire de recherche du Canada en éducation relative à l’environnement (Chaire ERE-UQAM) ▪ Coalition de l’ouest du Québec contre l’exploitation de l’uranium (COQEU) ▪ Coalition Stop Uranium de Baie-des-chaleurs ▪ Conseil central de la CSN de l’Abitibi-Témiscamingue et de l’Ungava ▪ Comité vigilance Malartic (projet minier Osisko) ▪ Écojustice ▪ Forum de l’Institut des sciences de l’environnement de l’UQAM ▪ MningWatch Canada ▪ Mouvement Vert Mauricie ▪ Nature Québe ▪ Professionnels de la santé pour la survie mondiale ▪ Regroupement pour la surveillance du nucléaire ▪ Réseau québécois des groupes écologistes (RQGE) ▪ Sept-Îles sans uranium Syndicat de la fonction publique du Québec (SFPQ) ▪ Société pour la nature et les parcs (SNAP-Québec) ▪ Tous nouveaux membres sont les bienvenus.


[1] Maisonneuve en direct, Radio-Canada, tribune du mardi 10 mai 2011