Publié le 18 juin 2018
À la lumière du forum soulignant les 10 ans de la Coalition Pour que le Québec ait meilleure mine (QMM), qui s’est tenu à Rouyn-Noranda les 15 et 16 juin, les participants ont fait valoir qu’il restait encore beaucoup de chemin à parcourir pour mieux protéger les citoyens et l’environnement face aux risques d’abus par l’industrie minière.
Les gens ont notamment dénoncé les limites réglementaires adoptées en 2013 qui permettent notamment aux projets de mines de métaux de moins de 2000 tonnes de minerai par jour et à ceux de graphite de moins de 500 tonnes par jour d’éviter les évaluations environnementales. Certains promoteurs n’hésitent d’ailleurs pas à calibrer leurs projets juste en-deçà de la limite, par exemple 1950 tonnes par jour, pour s’y soustraire.
«Ces limites sont totalement arbitraires et politiques et ne reposent sur aucune logique écologique, a fait valoir Ugo Lapointe, coordonnateur de MiningWatch Canada et cofondateur de QMM. De plus, même si la nouvelle Loi sur l’environnement permet à la ministre de soumettre n’importe quel projet à une évaluation environnementale complète, ce pouvoir est discrétionnaire. Les collectivités doivent donc faire des pieds et des mains pour pousser la ministre à l’appliquer.»
Une loi contestable
De toute manière, ce ne pourrait être qu’une question de temps avant que la Loi sur les mines ne soit contestée devant les tribunaux, ont fait observer plusieurs participants.
Me Sophie Thériault, avocate spécialisée en droit des peuples autochtones à la Faculté de droit de l’Université d’Ottawa, a ainsi souligné que l’autorisation donnée à tout détenteur de claim d’y exécuter des travaux sans aucune exigence de consultation ou d’accommodement était incompatible avec les obligations constitutionnelles du Québec envers les Premières Nations.
Non aux poursuites bâillons
Les participants du forum ont aussi dénoncé d’une voix commune la multiplication de poursuites intentées par des sociétés minières contre des citoyens, des municipalités et des communautés autochtones «lorsque ceux-ci tentent simplement de protéger leur milieu de vie, leur source d’eau potable ou d’autres bases économiques locales», a fait valoir QMM, par voie de communiqué.
La Coalition a cité en exemple la récente poursuite de 96 M $ intentée par Canada Carbon contre la municipalité de Grenville-sur-la-Rouge, dans les Laurentides.
La société de Vancouver souhaite y exploiter une mine de graphite et une carrière de marbre. Or, comme le projet est situé à proximité d’une zone agricole, les nouveaux élus municipaux ont, à l’automne 2017, amendé le règlement de zonage pour le freiner. Le 11 juin, Canada Carbon a officiellement déposé sa poursuite. Celle-ci représente près de 20 fois le budget annuel de la petite municipalité de 2800 habitants.
«Encore en 2018, les privilèges accordées à l’industrie par les différentes lois sont incompatibles avec la protection de l’intérêt public et d’une saine gestion du territoire», a dénoncé Ugo Lapointe.