Ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques
Édifice Marie-Guyart, 30e étage
675, boulevard René-Lévesque Est
Québec (Québec) G1R 5V7
OBJET : MÉMOIRE SUR LE PROJET DE RENOUVELLEMENT DE L’AUTORISATION MINISTÉRIELLE DE GLENCORE POUR LA FONDERIE HORNE
Par la présente, la Coalition Pour que le Québec ait meilleure mine et MiningWatch Canada souhaitent vous faire part de leurs principales préoccupations et recommandations concernant le projet de renouvellement de l’autorisation ministérielle de la compagnie multinationale Glencore pour l’exploitation de la Fonderie Horne.
À PROPOS DE NOS ORGANISMES
La Coalition Québec meilleure mine (QMM) et MiningWatch Canada (MWC) visent tous deux à promouvoir des meilleures pratiques et politiques publiques dans le secteur minier sur les plans social, environnemental et économique.
Fondée en 2008, la Coalition Québec meilleure mine regroupe aujourd’hui une trentaine d’organismes qui représentent collectivement plus de 250 000 individus de toutes les régions du Québec. La coalition regroupe des organismes citoyens, des organismes environnementaux, des syndicats, des universitaires et des associations de médecins. Depuis près de 15 ans, la coalition QMM a été au cœur des débats touchant le secteur minier et a contribué à sensibiliser les décideurs publics et un large pan de la société québécoise sur plusieurs enjeux qui touchent ce secteur. La coalition a contribué positivement à redéfinir les politiques publiques dans le secteur minier, notamment la Loi sur les mines, les redevances minières, les garanties financières à la restauration, l’encadrement environnemental, l’acceptabilité sociale, les territoires incompatibles à l’activité minière, de même que sur les positions du Québec concernant les filières minérales de l’uranium et de l’amiante, et plus récemment sur les minéraux dits « critiques et stratégiques ». Depuis 2008, les membres de la coalition ont participé à une quinzaine d’évaluations environnementales de projets miniers au Québec, dont une dizaine du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE). Depuis 2014, QMM est un membre actif du Comité consultatif du ministre des mines du Québec.
Fondé en 1999, MiningWatch Canada regroupe aujourd’hui une trentaine d’organismes membres qui représentent, collectivement, plusieurs centaines de milliers d’individus de partout au Canada. Depuis 20 ans, MWC est devenu un acteur incontournable avec plus de 200 enquêtes, interventions, rapports et actions juridiques sur autant de projets miniers à l’échelle nationale et internationale. Environnement, droits humains, droits autochtones, transparence et imputabilité des entreprises—voilà autant d’enjeux qui justifient les interventions de MWC à l’échelle des communautés comme à celle des politiques publiques. MWC est un membre fondateur et actif du comité aviseur de l’Initiative nationale pour les sites miniers orphelins et abandonnés (INMOA-NOAMI, fédéral/provincial), de même que pour le programme national de Neutralisation des eaux de drainage dans l’environnement minier (NEDEM-MEND). MWC a également été membre du comité aviseur du ministre des mines de l’Ontario, de la réforme fédérale sur les évaluations environnementales et de l’enquête nationale de la Commissaire à l’environnement et au développement durable sur l’application du Règlement fédéral sur les effluents des mines de métaux et de diamants au Canada. MWC a participé à une vingtaine d’actions juridiques, dont quatre à la Cour fédérale et à la Cour suprême du Canada en lien avec des enjeux miniers au pays.
DEMANDES
D’emblée, la Coalition Québec meilleure mine et MiningWatch Canada tiennent à souligner que tant le statu quo que le scénario actuellement proposé dans le cadre du projet de renouvellement de l’autorisation ministérielle de la compagnie multinationale Glencore pour l’exploitation de la Fonderie Horne sont inacceptables. La population de Rouyn-Noranda évolue depuis bientôt un siècle dans un environnement d’une qualité inférieure au reste de la province en raison des activités minières sur son territoire. Les problèmes de santé publique qui s’y accumulent ont été tolérés depuis trop longtemps par les dizaines de gouvernements successifs aux paliers provinciaux et fédéraux. Nous nous préoccupons aussi de la santé psychosociale de l’ensemble de la population incluant les travailleuses et travailleurs de la Fonderie Horne reliés aux incertitudes qui perdurent et au climat social qui se dégrade en raison de la complaisance des autorités envers la compagnie. La situation doit changer et au plus vite. La population de Rouyn-Noranda a droit à la même qualité d’air, d’eau, de sols, d’environnement et de vie que partout ailleurs au Québec.
1. Atteindre l’ensemble des normes provinciales à l’intérieur du délai de l’autorisation ministérielle à l’étude
La Coalition Québec meilleure mine et MiningWatch Canada se prononcent pour que le gouvernement du Québec contraigne la Fonderie Horne à atteindre l’ensemble des normes environnementales et de santé publique journalières et annuelles en vigueur à l’échelle de la province à l’intérieur du délai de l’autorisation ministérielle à l’étude. Cette demande vaut autant pour les émissions atmosphériques que pour la contamination de l’eau et des sols et pour tout autre contaminant dans l’environnement. Concernant particulièrement l’arsenic, l’atteinte de la cible intermédiaire de 15 ng/m³ devrait être atteinte dans les 12 mois suivant le renouvellement de l’autorisation ministérielle.
Cette position est largement soutenue à l’ensemble de la province. En effet, selon un sondage d’opinion réalisé par la firme Léger et commandé par la Coalition Québec Meilleure mine en août 2022, 81% des Québécois sont d’accord avec l’affirmation voulant que les « mines comme la Fonderie Horne à Rouyn- Noranda doivent respecter les mêmes normes d’émissions d’arsenic et d’autres métaux que partout ailleurs au Québec » .
2. Transparence
La Coalition Québec meilleure mine et MiningWatch Canada demandent que l’ensemble des données concernant les émissions dans l’atmosphère, l’eau et les sols de la Fonderie Horne soient rendues publiques de manière journalière, en temps réel et de manière gratuite sur un portail en ligne facilement consultable pour l’ensemble de la population.
Le nombre de stations d’échantillonnage doit être augmenté considérablement à l’ensemble du territoire de la ville, tout en conservant les emplacements actuels, de manière à permettre des comparaisons valables dans le temps à titre de référence. Minimalement, trois stations additionnelles, positionnées à tous les 90 degrés autour de l’usine, doivent être inclues afin d’avoir des mesures sur 360 degrés. Toutes les stations doivent être améliorées afin de mesurer les particules PM 2.5 et plus petites.
Le même raisonnement doit s’appliquer aux intrants de la Fonderie, soit les substances reçues de ses fournisseurs et destinées à y être traitées. Le ministère de l’environnement doit amender avant le renouvellement éventuel de l’autorisation ministériel la liste des six métaux inscrits à l’article 192, alinéa 3, paragraphe 2 du Règlement sur l’assainissement de l’atmosphère afin de l’élargir et couvrir l’ensemble des substances métalliques, métallurgiques, ferreuses, et des matières toxiques qui sont livrées à l’usine . À ce sujet, la Fonderie Horne ne devrait pas être autorisées à traiter les concentrés et substances métalliques hautement concentrées en métaux lourds cancérigènes ou potentiellement cancérigènes si, ce faisant, elle n’est pas mesure de respecter les normes d'émissions environnementales.
L’État québécois dispose de tous les pouvoirs pour mettre en place un registre public permettant aux citoyens de consulter en ligne gratuitement les données sur la qualité de l’air ambiant mesurées dans leurs milieux de vie. Une telle approche de transparence est conforme avec le principe d’accès au savoir inscrit dans la Loi sur le développement durable :
«accès au savoir» : les mesures favorisant l’éducation, l’accès à l’information et la recherche doivent être encouragées de manière à stimuler l’innovation ainsi qu’à améliorer la sensibilisation et la participation effective du public à la mise en œuvre du développement durable.
3. Application du principe pollueur-payeur
Le principe de pollueur payeur est enchâssé dans la Loi sur le développement durable :
«pollueur payeur»: les personnes qui génèrent de la pollution ou dont les actions dégradent autrement l’environnement doivent assumer leur part des coûts des mesures de prévention, de réduction et de contrôle des atteintes à la qualité de l’environnement et de la lutte contre celles-ci .
La Coalition Québec meilleure mine et MiningWatch Canada considèrent que le coût de l’ensemble des opérations devant conduire la Fonderie Horne au respect des normes en vigueur à l’ensemble de la province à l’intérieur du délai de l’autorisation ministérielle à l’étude doivent être portés uniquement par le promoteur.
Ce principe reçoit une adhésion très large dans la population à l’ensemble de la province. Suivant le sondage d’opinion réalisé par la firme Léger d’août 2022, 83% des Québécois sont d’accord pour « [a]ppliquer le principe pollueur-payeur pour que l'industrie minière paie la totalité de ses impacts sur l’environnement et la santé publique » .
Ce principe implique également l’imposition de sanctions pénales sévères dans l’éventualité où les cibles intermédiaires et finales de réductions des émissions de contaminants dans l’environnement ne sont pas respectées et ce, pour l’ensemble des normes. L’imposition de sanctions pénales plutôt qu’administratives se justifie par le caractère hautement dangereux des opérations menées à la Fonderie Horne pour l’environnement et la santé publique.
CONCLUSION
Nos positions s’appuient sur les données issues d’un sondage Léger récent sur l’industrie minière et reposent sur les principes enchâssés dans la Loi sur le développement durable, notamment les principes de santé et qualité de vie, d’accès au savoir et de pollueur-payeur. Plus particulièrement, nous demandons au gouvernement de contraindre la Fonderie Horne à atteindre l’ensemble des normes provinciales à l’intérieur du délai de l’autorisation ministérielle à l’étude, à accroître significativement les actions d’échantillonnage, faire preuve d’une complète transparence, et appliquer le principe pollueur-payeur.
Dans tous les cas, nous souhaitons que l’autorisation ministérielle à l’étude, laquelle accorde de nouveau un passe-droit permettant de rejeter des contaminants au-delà des normes existantes, soit la dernière à être émise à la Fonderie Horne, de sorte qu’à son terme dans cinq ans, l’usine doive se conformer au régime juridique général en vigueur dans la province du Québec.
Nous vous remercions à l’avance de l’attention et de la diligence que vous accorderez à notre mémoire et nous vous assurons, par le fait même, de notre pleine et entière collaboration pour toute information complémentaire que vous jugerez pertinente quant aux enjeux du présent dossier.
Salutations cordiales,
- Me Rodrigue Turgeon, M.S.V.D., J.D., Co-responsable du programme national, MiningWatch Canada, Coporte-parole de la Coalition Québec meilleure mine, 870, av. De Salaberry, bureau 207, Québec, Québec, G1R 2T9 | www.quebecmeilleuremine.org
- Ugo Lapointe, B.Sc.H., Cofondateur et coporte-parole de la Coalition Québec meilleure mine, Consultant indépendant | Réduction de l’empreinte minérale et utilisation responsable des minéraux, 870, av. De Salaberry, bureau 207, Québec, Québec, G1R 2T9 | www.quebecmeilleuremine.org