(Ottawa / Amsterdam) Un mécanisme gouvernemental fondé en 2000 pour promouvoir la conduite responsable des multinationales s’avère incapable de remplir sa mission de prévention et d’accès à un recours efficace dans le cas de violations des droits de la personne perpétrées par des sociétés canadiennes opérant à l’étranger, d’après un rapport publié aujourd’hui par Above Ground, Mines Alerte Canada et OECD Watch, tandis que se tient à Genève le Forum annuel des Nations Unies sur les entreprises et les droits de l’Homme.
Le rapport « Le Canada est de retour »… en queue de peloton! met en lumière la manière dont les plaintes pour préjudices graves liées aux projets miniers canadiens sont traitées par le Point de contact national (PCN) du Canada pour les Principes directeurs de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), un mécanisme à participation volontaire qui vise le règlement des différends par la « facilitation du dialogue ». Le PCN est une pièce maîtresse de la Stratégie de responsabilité sociale relative aux entreprises du gouvernement canadien, qui le décrit comme « un mécanisme éprouvé de résolution de conflits ».
Les plaintes examinées dans le rapport concernent des allégations de pratiques répréhensibles d’entreprises qui se sont soldées par des dommages importants à l’environnement, la mort de dizaines d’ouvriers miniers, des expulsions forcées violentes ainsi que des agressions et des meurtres impliquant des membres des forces de l’ordre et du personnel de sécurité.
« Dans certains cas, la situation a même empiré depuis que les collectivités touchées ont porté plainte, » explique Geneviève Paul, agente de programme à Above Ground. « Il est urgent de mettre sur pied de nouveaux mécanismes de pour résoudre les conflits et assurer l’accès à des recours effectifs pour les personnes affectées par les entreprises multinationales canadiennes. »
La politique du gouvernement, qui consiste à retirer le soutien commercial offert par le gouvernement du Canada pour faciliter l’accès aux marchés internationaux aux entreprises qui refusent de participer au processus, est quant à elle inefficace.
« Comparativement à ses homologues des autres pays, le PCN du Canada applique des critères élevés d’admissibilité des plaintes et ne mène pas d’enquête pour savoir si les entreprises visées ont dérogé aux Principes, » indique Catherine Coumans, coordonnatrice de la recherche à Mines Alerte Canada.
« De toutes les plaintes directement traitées par le PCN canadien, seules deux ont abouti à une entente entre la multinationale et les plaignants, » souligne Joseph Wilde-Ramsing, coordonnateur à OECD Watch. « Aucun processus efficace n’est en place pour vérifier si les entreprises suivent réellement les recommandations du PCN ou respectent leurs propres engagements. »
Ce rapport s’inscrit dans un nouvel effort de la société civile canadienne visant l’instauration de mécanismes efficaces en matière de responsabilité des entreprises. En octobre dernier, des chercheurs de la Osgoode Hall Law School ont rapporté qu’au moins 44 personnes avaient été tuées et que des centaines d’autres avaient été blessées dans le cadre de conflits entourant les mines canadiennes en Amérique latine. Par ailleurs, le Réseau canadien sur la reddition de compte des entreprises a récemment publié un modèle législatif pour la création d’un ombudsman des droits de la personne qui se pencherait sur les projets extractifs canadiens à l’étranger – une mesure que tous les grands partis canadiens, sauf un, ont promis l’an dernier qu’ils appuieraient.
Au sujet des auteurs du rapport
Above Ground promeut le respect des droits de la personne. Nous encourageons le gouvernement canadien à s’acquitter de son obligation légale de protéger quiconque contre les atteintes aux droits de la personne perpétrées par le secteur privé et à assurer l’accès à la justice pour les victimes de préjudices causés par les entreprises canadiennes à l’étranger. Au travers d’activités de rechercher, d’analyse, de collaboration et de sensibilisation, nous mettons au jour les liens entre les multinationales et les violations des droits de la personne, et nous proposons des solutions pour la reddition de comptes des entreprises au Canada. Le projet Above Ground fait partie de la Plateforme partagée de Tides Canada qui soutient les efforts faits sur le terrain en vue de générer des solutions inédites pour le bien commun. Tides Canada est un organisme de bienfaisance canadien et de portée nationale qui se consacre à la protection de l’environnement, à l’équité sociale et à la prospérité économique.
Mines Alerte Canada est une initiative pancanadienne appuyée par des groupes œuvrant en faveur de la justice sociale ainsi que des organisations environnementales, autochtones et syndicales provenant de toutes les régions du pays. Mines Alerte vient combler le besoin urgent d’une réponse coordonnée en fonction de l’intérêt public face aux menaces à la santé publique, à la qualité de l’air et de l’eau, à l’habitat de la vie marine et de la faune et aux intérêts communautaires que posent les politiques et les pratiques minières irresponsables, tant au Canada qu’à l’étranger.
OECD Watch est un réseau mondial comptant plus de 100 membres issus de 50 pays différents et d’un éventail d’organisations de la société civile. Tous partagent le même engagement : s’assurer que les victimes de mauvaise conduite des entreprises aient accès à des recours, que les activités commerciales contribuent au développement durable et à la réduction de la pauvreté, et que les entreprises soient tenues responsables de leurs actions partout dans le monde.
Personnes-ressources pour les médias
- Geneviève Paul, agente de programme, Above Ground, 514 618‑7094 (téléphone cellulaire), [email protected] – Entrevues en français, en anglais et en espagnol
- Catherine Coumans, coordonnatrice de la recherche, Mines Alerte Canada, 613 256‑8331, [email protected] – En anglais
Au sujet du PCN
Les Points de contact nationaux (PCN) sont des mécanismes que les pays membres de l’OCDE doivent mettre en place pour encadrer la mise en œuvre des Principes directeurs de l’OCDE à l’intention des entreprises multinationales, une série de normes non contraignantes en matière de pratiques commerciales responsables. Le rôle du PCN consiste à accroître l’efficacité des Principes directeurs en les faisant connaître et en favorisant leur adoption par l’examen de « circonstances spécifiques », soit des cas présumés de non-observation des Principes, aux fins de règlement des différends. Le PCN exerce ses activités conformément aux « critères fondamentaux de visibilité, d’accessibilité, de transparence et de responsabilité ».